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Anne-Sophie Migné - Mon territoire de mer

La création est pour moi une question de territoire, le seul que je reconnaisse au cours de mes pérégrinations et qui paradoxalement n'a pas de frontière. Je suis autodidacte et à ce titre pleinement consciente de ce qui me nourrit au plus intime. Là où on attend un style, où on attend une démarche, on attend finalement une conscience pour organiser tout cela, cet ensemble. Or dans ce qui se montre là préside ou le plaisir ou la souffrance, souvent les deux ensemble. Ce qui organise en définitive toutes ces oeuvres, cette disparité apparente (seulement), ce sont deux mains posées sur la terre, tour à tour caressantes, perforantes, déchirantes. Cette entreprise est d'abord une histoire de corps.

Et puis il ne faut pas se leurrer, on y met de l'intello, là où ça arrange, et souvent après coup parce que sur le moment il n'y a rien de tout cela! Ni croquis ou si peu, ni mot ou seulement une mise en bouche. Des images, oui ! en pagaille, des télescopages à n'en plus finir. Et puis soudain un tremblement dans les doigts comme une bouture qui prend et là, cet autre tremblement de conscience, plus douloureux: celui de devoir s'y mettre et comprendre qu'on tient un fil. Tel un équilibriste on a hâte d'arriver au bout et de ne plus avoir à retenir son souffle.

Alors recherche d'identité, sans doute, défi de l'altérité, certainement, dans l'attente du regard de l'autre qu'il faut éviter le plus possible, oui ... tout cela surgit inévitable, mais si on cherche à maîtriser, éperdument, cela échappe et nous laisse interloquée.

Et pourtant, et pourtant on y retourne avec rage!

Et quand on s'y attendait le moins, l'objet, la forme extrêmement vivante se dessaisit de nous ... tout recommence alors comme une mer.

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